LES PEINTURES MURALES

La restauration du retable baroque commença en 1988. Les travaux consistèrent à démonter les panneaux de bois qui composent l’œuvre pour les remettre en état. Lors de cette opération, les ouvriers mirent à jour des peintures couvrant la quasi- totalité du mur du chevet que le retable cachait depuis plus de trois cent ans.

Alerté, le ministère de la Culture détermine la valeur des fresques qui forme un ensemble pictural extraordinaire et décide de conserver ce patrimoine en remontant le retable au milieu du chœur, créant ainsi, un couloir à l’arrière pour admirer les fresques.

 

Il s’agit de peintures médiévales occupant le mur en différents registres. Ce décor correspond à un ensemble qui concernait, à l’origine, le sanctuaire et toute l’église. Le style des encadrements architecturaux et le caractère des personnages laissent penser qu’il s’agit de peintures exécutées dans la deuxième moitié du XIV ème siècle.

 

Le registre du bas se compose d’une draperie peinte de couleur brun-orangé. Au-dessus, c’est un décor en fausse maçonnerie qui apparaît, les blocs, en grand appareil, sont colorés en rouge et jaune et décorés de motifs géométriques et floraux.

Plus haut, se trouvent deux registres historiés, superposés et disposés symétriquement autour d’une partie centrale traitée en faux appareil jaune et vert. Ces registres représentent des scènes de la Passion du Christ logées sous des arcs trilobés. Les fonds des scènes sont peints alternativement en gris et rouge s’opposant ainsi aux écoinçons des arcs. Dans le registre inférieur gauche, on peut voir la scène dite du Noli me tangere et la Descente aux Limbes. Alors que, dans le registre supérieur gauche se trouve le Baiser de Judas, l’Arrestation du Christ, le Couronnement d’Epines et la Flagellation.

En 1679, lors de la pose des niches du retable, le mur est bûché à deux endroits, occasionnant ainsi la disparition de deux scènes. Le décor du coté droit étant très usé, la lecture des scènes est difficile. On aperçoit, dans l’une d’elles, les ailes d’un ange, dans une autre, un arbre et un personnage vêtu de noir et coiffé d’un chaperon gris.

Figure 9 : Peintures murales (détail), la Descente aux Limbes, XIVème siècle.

Au bas, du registre supérieur, on distingue une litre funéraire peinte sur le décor d’origine. Une litre est une large bande noire que l’on apposait dans l’église lors de funérailles seigneuriales. La partie centrale inférieure est peinte en faux appareil jaune et vert comme nous l’avons dit plus haut. A une époque ultérieure, cette partie fut décorée de neuf scènes de petites dimensions posées par trois sur trois lignes. Ces scènes sont séparées par un bandeau blanc orné de palmettes rouges.

Dans la partie supérieure du mur du chevet, le décor en faux appareil jaune et vert continue au-dessus des scènes de la Passion du Christ jusqu’au registre historié monumental. Au centre, un panneau carré abritait un Christ en majesté dans une mandorle. Les écoinçons sont ornés des symboles des Evangélistes. De chaque coté de ce panneau, se trouve de grands personnages, debouts, auréolés et tenant des phylactères. Il s’agit des douze apôtres du Christ.

Plus haut, le mur est peint en faux appareil jaune et vert jusqu’au toit. De nos jours, la toiture est masquée par une voûte en plâtre exécutée en 1856.

Le mur Nord du chœur est sondé en 1992, laissant apparaître des peintures. L’année suivante, ce mur est dégagé et révèle la présence de différents décors appartenant à des époques distinctes. La couche de plâtre cachait la niche à reliques ornée de motifs géométriques blanc et rouge peints directement sur la pierre. On a également découvert une embrasure en pierre bouchée par l’ouverture d’une fenêtre plus vaste et plus haute d’époque moderne. L’ancienne fenêtre a été dégagée et reconstituée.

La restauration du mur latéral a permis de mettre en évidence le haut de scènes historiées. C’est la continuité des registres de la Passion du Christ du mur du chevet.

D’autres peintures, postérieures à celles du XIVème siècle, ont été mises à jour. On peut admirer un personnage barbu tenant une palme abrité sous un dais gothique de pierre. Ce décor date de la fin du XVème siècle. Le dégagement de l’ancienne fenêtre a laissé apparaître des peintures recouvrant l’ébrasement. Il s’agit de portraits de personnages inscrits chacun dans un médaillon. Ce décor est également du XVème siècle.

Des peintures sur badigeon, datant du XVIIème ou XVIIIème siècle, entourent la porte de la sacristie.

 

Lors des travaux de restauration, le mur sud du chœur a été sondé mais aucune trace de décor n’a été découverte.

 

Comme nous l’avons vu plus haut, ce décor pictural, ornant le sanctuaire de l’église, date de la deuxième partie du XIVème siècle. Cette époque correspond à la modification du mur du chevet. Effectivement, le chœur se composait d’une abside mais cette construction fut détruite. On décida de remonter le mur formant ainsi un chevet plat. Cette imposante surface servira de support à l’immense décor que nous connaissons. Un enduit à la chaux assez irrégulier et dressé de façon grossière est appliqué sur le mur de pierre. Sur cet enduit, les artistes ont exécuté le décor suivant une technique de peinture dite à la détrempe. Les pigments utilisés sont l’ocre rouge, l’ocre jaune, le noir et le bleu. Les auréoles de certains personnages sont imprimées dans l’enduit encore frais. Le décor du XV ème siècle est également peint sur enduit de chaux avec la même technique utilisée antérieurement.

 

Ces peintures ne concernent pas seulement le chœur de l’église, des fragments de décor, semblable à ceux du sanctuaire, ont été mis à jour dans la chapelle Saint Eutrope ainsi que dans celle des Agonisants. On peut penser qu'à l'origine l’édifice était entièrement décoré de peintures.

Les travaux de restauration ont permis de découvrir des traces de décor antérieur à l’ornementation du XIVème siècle. Il s’agit de peintures appliquées directement sur la pierre et les pigments utilisés sont le rouge et le blanc. Le plus bel exemple est le décor de la niche à reliques parfaitement conservé et composé de motifs géométriques.

 

Au Moyen Age, le clergé poursuivait deux buts à la fois, distincts et complémentaires en décorant les églises. Il embellissait l’édifice et enseignait aussi aux fidèles les vérités premières en catéchisant par l’image car le peuple ne savait ni lire ni écrire.

L’année même de leurs découvertes, les peintures sont classées parmi les Monuments Historiques. Un programme de restauration est établi en plusieurs tranches. La première intervention sur le mur du chevet a lieu en juillet 1992. Les travaux consistent à dépoussiérer les peintures, dégager les surfaces couvertes par des couches de plâtre et d’enduits peints. L’année suivante, c’est au tour du mur latéral nord du sanctuaire d’être dégagé, les peintures sont consolidées et la baie nouvellement découverte est reconstituée alors que la fenêtre moderne est bouchée. Il restait à effectuer les opérations de restauration de ces peintures. Une deuxième intervention sur le mur latéral est entreprise en 1996. Les zones lacunaires sont polies à la chaux et les retouches des couleurs sont réalisées à l’aquarelle redonnant aux différents décors une lecture plus claire.

 

Quant au grand mur du chevet, il est restauré en 1998. Les zones lacunaires ont reçu un enduit à la chaux. Les peintures sont également retouchées à l’aquarelle. Un évier logé dans la partie inférieure du mur est mis à jour. Cet élément est particulier car il est composé d’une cuve creusée dans une pierre servant de réserve d’eau. Le liquide se déversait dans une petite cuvette de pierre par l’intermédiaire d’un robinet (la cuve est percée d’un orifice pouvant recevoir un robinet ). L’eau s’écoulait ensuite dans la rue. La niche à reliques et l’évier sont des éléments caractéristiques d’un sanctuaire médiéval.

La restauration des peintures a été entreprise par Claire Delhumeau et son équipe.

Cette restauration a permis d’apprécier un décor pictural du XIVème siècle unique dans la région par son importance et la valeur des peintures. Ces fresques sont les témoins du riche passé de l’église Saint Christophe de Lasbordes.

 

Figure 10 : Peintures murales (détail),médaillon, XV ème siècle.